Expositions d'art au théatre de Sombrum

Dans l'intimité obscure de la Taverne de la Sombre, à la lueur des oriflammes, le Vicomte venait d'inaugurer son œuvre mort-vivante. Mystérieuse et quelque peu troublante, la création prenait une forme bien étrange : une revenante éclatante filant de son propre éther à l'aide d'un rouet, eux même les pieds plongés dans leur propre cercueil.

L'aristocrate Mortan prétendait avoir donner l'existence à une image métaphorique, la pièce se proposait comme une démonstration de la quintessence tragique de l'Art du Trois Fois Cillias, y mêlant Spectacle Vivant, et Art Mortuaire... Éloge explicite à l'Entropie, l'œuvre de détruisant elle même pour former de sa ruine, l'essence même de l'Art...

Sur le bord 'un garde fou, on pouvait lire une petite note :

Citation :

Epouse défunte, toi qu’on a arraché des bras de ton époux trépassé, tes larmes pleurent le déchirement de ta couche funèbre fracassée.

File la laine, filent les jours…

Bercée par les couinements d’une courroie asséché par les ages, écoute le cuire frotter douloureusement sur les boiseries gâtées.

Garde ma peine et mon amour…

Digne dans ta peine, ton corps spectrale voûté sur le rouet, la finesse de tes gestes n’ont d’égale que la profondeur de ta mélancolie.

Livre d'images des rêves lourds…

Files, files, délie toi dans ta tache, car ta salvation naîtra de ta perdition, et abandonne ton existence temporelle pour arborer le Dernier Sommeil.

Ouvre la page à l'éternel retour.

En pretant attentivement l'oreille la Revenante entonnait une mélodie à peine audible :

File la laine, filent les jours…

Garde ma peine et mon amour…

Livre d'images des rêves lourds…

Ouvre la page à l'éternel retour.

Maldazzar assista à la scène, assied au bar, où il discutait avec une femme nargolithe qu’il jugeait peut-être un peu trop critique face au spectacle se déroulant sous leurs yeux. Celle-ci eut tout le loisir de le faire paraître tout aussi virulent juge qu’elle-même, en déformant à voix haute certaines affirmations qu’il chuchota à voix basse. La dame alla même jusqu’à faire offense à la noble Mai’Nellya, ce que Maldazzar réprouvait vivement.

Du moins, était-ce la version des faits telle qu’il la racontait…