C’était la guerre ! Le sifflement des flèches, perforant l’air d’un naturel relâchement de doigt. La stridence des lames s’entrechoquant, révélait l’infatigable endurance des combattants. C’était la guerre, un affront socialement incontournable, opposant Gorlaks et Narsillions aux Hastanes, Dalwaënas et Nalkiris, un conflit coûteux, un affrontement légendaire ; une guerre qui coucha plus d’homme qu’elle n’en éleva.
En quête de pouvoir, de prospérité, plusieurs mercenaires Nargoliths partirent défendre l’intérêt des siens, se joignant à la cause qui pour eux, ce veut spirituelle, sous l’ombre de Narshoul le noir. Rien n’était si beau, si leste, si brillant, si bien ordonné que les deux armées. Les lourdes bottes, les épées, les arcs, les haches, les cris de guerre, formaient une harmonie telle qu’il n’y en eut jamais au royaume de Kalos. Des volées de carreaux renversèrent d’abord à peu près six mille soldats de chaque côté ; ensuite la baston ôta du meilleur des mondes environ neuf à dix mille pantins qui en infectaient la surface. La sorcellerie fut aussi la raison suffisante de la mort de quelques milliers d’entre eux. La boucherie héroïque pouvait bien se monter à une trentaine de mille d’âmes. Ce n’était que l’aube, des tas de morts et de mourants, un village voisin ; il était en cendre. Ici des vieillards criblés de coup regardaient mourir leurs femmes égorgées, qui tenaient fermement leurs enfants dans leurs bras ensanglantés ; là des filles, éventrées après avoir assouvi les besoins naturels de quelques héros, rendaient les derniers soupirs ; d’autre, à demi brûlées, criaient qu’on achevât de leur donner la mort. Des têtes étaient répandues sur la terre à côté de bras et de jambes coupés. Le vent, au travers les heaumes, souffla une brise de terreur. Le soleil miroitait la haine, sur les armures métalliques des défunts guerriers. La mort se réjouissait de l’atmosphère vicieuse. Les arbres pleuraient, une calamité cannibalesque alors que l’herbe s’abreuvait, du résultat sanglant de ces rencontres. Le paysage offrait une vision d’apocalypse sous un pâle et triste soleil obscurci par la poussière et la fumée. Les terres agricoles, tout avaient été brûlées ; il ne restait que des chicots rabougris et fumants. Dans les vergers dévastés se dressaient les squelettes noircis des arbres. Tout avais été brûlé par le feu. L’air résonnait des plaintes déchirantes des blessés. Quantité de soldats de l’armée en retraite étaient tombés au bord de la route ; certains respiraient encore, d’autres portaient le masque terreux de la mort.
Les forces diminuèrent à l’usure du temps. La horde des Gorlaks perdit ses généraux, le chaos régnait dans les régiments. L’Armée Narsillionne voyait ses effectifs diminués, la symétrie conflictuelle, brisée tel un éclat de verre. Les champs de bataille se firent de plus en plus rare, jusqu’au jour où, la quiétude d’autrefois, revint éclaircir le ciel. L’hostilité, quant à elle, resta toujours présente, n’assurant aucun voyageur d’une tranquillité d’esprit.
Parce qu’elle se complaît au seuil de la nuit, qu’elle est cette femme témoin de l’éternelle misère, assailli d’angoisse devant le temps qui fuit et la vie qui s’émousse, Sergorath s’étourdit, de rêves de d’espace. Elle voyage sur une chevelure, se joue des mots, célèbre la perfection, se grise de pouvoir, se mire dans les yeux des chats et dans ceux, plus troubles, des Nargoliths.
- En rouvrant mes yeux pleins de flamme. J’ai vu l’horreur de mon taudis. Et senti, rentrant dans mon âme, la pointe des soucis maudits. Mes frères, mes sœurs. Songez à la douceur, d’aller là-bas vivre ensemble, bâtir nos murs, érigé nos mœurs, approfondir notre culture, devenir un peuple uni et mûr, mettre fin au calvaire. Songez à la délicatesse, d’aller là-bas construire un monde loin de l’enfer, un endroit qui nous caresse.
Ce bref discours, déclancha une migration impressionnante. Sergorath marcha devant, d’un pas fier et décidé. Le peuple talonnant derrière, suivait un esprit divin. Elle avait réponse à tout, à chaque problème une solution, à chaque péripétie un dénouement. Alors courrait une rumeur, qu’elle désamorça d’une déclaration, où elle s’avoua être la progéniture de Narshoul lui-même. Elle signifia son devoir ; dresser un empire plus dur que le fer, plus rapide que la flèche, plus fort que la force, plus agile que l’agilité. Venger un passé douloureux avec des mots, détruire l’ennemi avec des fleurs. La perfection intellectuelle comme arme de prédilection.
Nul ne l’avait jamais remarqué avant cette nuit, nul ne l’avait connu avant cette apparition. Son charisme, sa grâce et ses idées, fit d’elle une dirigeante incontestée, une oratrice ensorcelante, une philosophe héroïque. Quelques petits groupes marginaux s’y opposèrent, ils furent vite mis de côté, considérés comme obstacle à la prospérité et au développement social. Elle écrit des thèses, des théories, assisté de son bras droit, ils mirent en place un régime politique infaillible, où elle le nomma Chancelier. Sa tâche première et primordiale, évoquer la paix sur les landes avec les races ennemies, pour ainsi redonner espoir de vie aux Nargoliths. Il alla en personne, à la conquête des bureaux de la diplomatie Hastane, présentant un contrat, une sorte de constitution, visant à valoriser les deux peuples. Ce traité de paix prit un temps fou à être répondu. Les Hastanes semblaient chercher un défaut, une parallèle, la moindre faille, pour déjouer l’arnaque du peuple noir. Ils n’en trouvèrent aucune, de plus les objectifs du contrat étaient très attrayants. Ils acceptèrent, sans trop poser de question. Le peuple était conscient de l’importance de cette constitution, ce pourquoi il n’y eu aucune anicroche politique. Leur image avait un plus gros pesant d’or, qu’une simple querelle de politicaillerie.
Sergorath fit enfermé dans ces geôles, tout les Narsillions restant, prouvant ainsi un réel désir de mettre un terme à ce conflit. Loin d’être dans son idée qu’ils soient tous voué aux sorts des prisonniers, elle fit construire une caverne, qui aujourd’hui veut que son emplacement soit inconnu. Certains disent que cette geôle archaïque ce trouve tout juste en dessous de celle de Sombrum, d’autres préfèrent croire qu’il a une entrée dissimulée, d’une grotte cryptique non loin de la cité, qui fut jadis contrôlé par Sergorath, et qui à ce jour, soit sous la hantise des défunts guerriers.
Depuis ce jour, nous et le peuple à cheval, les Hastanes, vivons une harmonie mitigée par nos convictions, nos mœurs et notre vision purement différente de ce que représente la sagesse, la vie et l’essence qui nous alimente.